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Episode spécial : « Comment les bébés en viennent un jour à parler ? » (première partie)

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  • Le 21/03/2020

Ce week end, pour changer des épisodes de cette semaine, je vous propose de vous donner des pistes pour répondre à cette nouvelle question , en vous livrant un extrait de la première partie du livre que j’ai eu la chance de co-écrire : Bébé s’exprime par signes (C. Nougarolles et A. Galon, MANGO)

Quand on observe un tout-petit se mettre progressivement à « parler » on ne le voit pas en train de faire un apprentissage, comme ce sera le cas plus tard pour la propreté, la marche ou même les apprentissages scolaires. Il « plonge » dans la langue parlée autour de lui, il va écouter, tenter d’imiter, recommencer, entendre les modèles maintes fois redonnés, pour, un jour, aboutir à de beaux discours ! 

Les bébés naissent avec plusieurs grands pouvoirs :

  • Percevoir l’autre grâce à certains sens, dont l’ouïe, mais aussi la vue et le toucher, 
  • Etablir un lien avec lui, grâce à l’attention conjointe et au pointage du doigt,
  • Se « nourrir » de lui par le processus de l’imitation. 

Le jour de sa naissance, le premier cri est une réaction physiologique il n’est pas intentionnellement destiné à quelqu’un, il ne s’agit donc pas encore de communication au sens strict du terme. Peu à peu, en revanche, va se tisser un lien lié à ses appels : maman accourt quand bébé pleure, bébé pleure pour appeler maman... La communication s’installe ! 

À l’âge de 2 mois, le bébé cherche activement le regard des personnes qui se présentent à lui. Il est donc crucial pour un adulte, face à un tout-petit, de ranger son téléphone portable ou d’éteindre les écrans alentours, car ils vont détourner son attention ailleurs. Si l’adulte pianote sur son téléphone alors qu’il est placé face à son bébé, le bébé ne percevra pas son regard, mais le dos de sa main. Il risque alors de chercher en vain un regard adulte. 

Concrètement, les premiers jours après la naissance comment aider mon enfant à entrer en communication ? limiter les bruits environnants, favoriser des temps de face à face pour échanger par le regard, même silencieusement, prendre le temps d’observer mon bébé : ses mouvements, ses mimiques, ses regards, lui laisser le temps en se mettant à son rythme de bouger, de regarder, d’orienter son regard, d’écouter : sa vie, pour le moment, c’est être dans la perception sensorielle en permanence. 

Une des grandes questions qui a taraudé les hommes depuis la nuit des temps est : « Quelle serait la langue naturelle innée parlée par un enfant, la langue originelle ? » . Frédéric II du Saint-Empire (qui parlait huit langues) exigea en 1211 de confier tous les bébés d’un orphelinat à des nourrices à qui l’on avait demandé expressément de s’en tenir aux soins corporels (nourrissage, toilette, habillage) sans prononcer le moindre mot. À la fin de l’expérience, malheureusement, aucun bébé ne survécut, la « nourriture du langage » s’étant révélée aussi cruciale que la nourriture alimentaire !

Plus récemment dans l’histoire, les chercheurs en linguistique, en psychologie, puis en sciences de l’éducation, ont observé, mesuré, quantifié le développement du langage de l’enfant. Ils sont arrivés à un consensus qui allie des compétences innées du nourrisson (sensorialité, regard, attention conjointe, pointage, imitation, capacité à établir des liens sociaux, entre autres...) et des compétences qui s’acquièrent peu à peu dans un environnement donné (la langue maternelle change d’un pays à l’autre, les sons de cette langue aussi, ainsi que certains codes de communication). 

Dès sa naissance, le bébé va utiliser la communication non verbale, puis, fort de sa capacité à regarder, écouter, ressentir des émotions, il va utiliser son sens de l’imitation et la découverte de son « appareil à parler » pour s’inscrire peu à peu dans l’oral.

  • de la naissance à deux mois environ, le bébé est dans une perception qui engage tous ses sens : il perçoit des bruits et des attentions ;
  • à partir du 2e ou 3e mois, il commence à exprimer des sons : il teste sa voix avec ses premières productions vocales : les lallations, appelées aussi les gazouillis, qui vont s’organiser peu à peu et devenir le babil.

=> bébé imite maman ou papa ou grand.e frère/soeur, puis le grand imite bébé, et ainsi de suite ! Bébé est fasciné par la musique de la langue qu’il entent (les intonations, la mélodie, le rythme). « Cette mélodie, c’est la colonne vertébrale du langage oral, on l’appelle la prosodie et elle nous attire, nous rend attentif, nous porte, nous transporte, nous chavire et nous émeut toute notre vie ! D’ailleurs, c’est pour ça que la voix de la « dame de la SNCF » semble en faire des tonnes. Si elle restait de marbre, les passagers n’écouteraient pas les messages du haut-parleur de la gare !

Concrètement, que puis-je faire avec le bébé dont je m’occupe ? Prendre le temps d’être disponible et privilégier des moments en tête- à-tête (ce n’est qu’une question d’organisation et ça peut même nous donner l’impression délicieuse d’avoir des moments de calme !), continuer d’observer ce bébé : outre ses mimiques, mouvements, regards, j’écoute désormais ses vocalises, ses gargouillis…, instaurer des jeux rituels autour de l’imitation : s’amuser à tirer la langue à ce bébé, grimacer, pousser des petits cris et surtout, penser à imiter son bébé en lui renvoyant ses mimiques, ses cris gutturaux : « gagatiser », c’est bon pour les tout-petits ! 

Le bébé s’est désormais inscrit dans cette relation privilégiée de proximité, dans laquelle il perçoit, tente d’imiter, s’essayant à utiliser cette « machine à parler » (sa bouche, associée à ses poumons, les muscles de son buste, ses oreilles, son nez, son visage). 

Pour réussir son projet, il a à sa disposition plusieurs ressources innées très importantes, liées aussi au bon fonctionnement de son système sensoriel :

  • l’attention conjointe : c’est l’attention partagée par la mère et son bébé qui regardent ensemble la même chose et en même temps. C’est par exemple une des clés qu’utilise le petit pour enrichir son vocabulaire : « Chaque fois que je regarde ce que maman/nounou regarde, elle me dit comment ça s’appelle, elle “étiquette” les objets » ; 
  • le pointage : à partir de 8 mois, engagé dans une situation d’attention conjointe, quand bébé pointe son doigt vers un objet, il signale son intérêt à l’adulte qui se tourne vers le même objet. Ce comportement peut signifier que le bébé veut l’objet, qu’on le lui donne ou bien qu’il demande simplement comment ça s’appelle, qu’on le lui nomme. 
  • l’imitation : « Je produis un bruit/un mot/une phrase, l’adulte m’imite (ou, plus tard, il rétablit le mot/la phrase) et par voie de conséquence je l’imite à nouveau ». C’est par ce procédé d’imitation que le bébé va découvrir les alternances de prises de tours de rôles, enrichir son vocabulaire, mais aussi, plus tard, toute l’organisation de ses phrases (à force d’entendre telle ou telle structure de phrase, en bon grammairien qu’il est, il se lance à son tour...

=> lorsqu’on écoute le babil ou les lallations de son bébé, c’est une manière de lui dire, sans lui faire de grands discours « oui, voilà, tu parles et même, on te comprend ! », c’est faire de lui un être de langage, lui donner l’intention et l’envie de communiquer ! 

=> bébé est engagé dans un profond travail pour lequel il est très bien outillé ; en tant qu’adulte, on ne peut être qu’ébahi quand on observe à quelle vitesse et avec quelle « facilité » le jeune enfant absorbe une langue, sa syntaxe (= l’ordre des mots), sa richesses lexicales (= les mots), ses niveaux de langue... 

Concrètement, que puis-je faire avec le bébé dont je m’occupe ? chanter des comptines (elles apportent mélodie, rythmes et plaisir à votre bébé) ainsi que tous les jeux d’imitations (mimiques, sonores, gestuelles), en face à face visuel ou en écho sonore à distance dans la voiture par exemple. Continuer à prendre plaisir dans les moments privilégiés de face à face : lors du change, des repas, du jeu, des temps de chansons... 

(la suite demain…)

mise à jour au 24 avril 2024 :

 

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