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Episode 5 : “j’ai peur qu’il devienne un roi, voire un tyran, si je le laisse faire…”

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  • Le 19/03/2020

Episode 5  : "je suis un parent à la maison avec mon/mes enfant.s : j’ai peur qu’il devienne un roi, voire un tyran, si je le laisse faire… »

En tant que parent, on peut se poser cette question, ce sont également parfois les paroles des « bonnes fées qui se penchent sur les berceaux de nos enfants » :

  • « tu n’as pas peur qu’il fasse sa loi ? »
  • « c’est un sacré coquin, mon petit fils, faut voir comme il en fait baver à ses parents : ils lui donnent ça et lui, il en redemande toujours plus !  »
  • « je serais toi, j’arrêterais de répondre à chacune de ses exigences, parce que là, ça va être de plus en plus compliqué ! »,
  • « ah ! chez vous c’est les enfants qui commandent ?! ».

(l’une de ces quatre fées donne presque un bon conseil et une autre fait une observation pleine de bon sens, …)

Encore une fois, changeons de posture et observons le monde du point de vue de l’enfant. 

A sa naissance, le petit d’homme est complètement dépendant de l’adulte : contrairement aux petits des primates qui naissent et s’accrochent aux poils de leur mère, tètent, puis peu à peu en descendent, font le tour et remontent s’accrocher, ou aux petits des mammifères à quatre pattes qui naissent, se mettent debout et les suivent, nos petits à nous naissent prématurément. C’est l’évolution de notre position sur deux jambes, la bascule du bassin des femmes,… les mères mettent leurs bébés au monde alors qu’ils sont si immatures qu’ils ne peuvent ni s’accrocher à elles (qui n’ont plus de poils !), ni les suivre, car ils ne pourront marcher qu’autour d’un an, ni s’alimenter seul…

Alors, dans une grande bienveillance, et par imitation ancestrale des gestes vus depuis qu’elles sont petites, les mères portent, nourrissent, changent, habillent leurs bébés. Les bébés grandissent et les mères continuent à porter (ou à mettre dans une poussette), habillent et déshabillent, elles donnent à manger, mettent les chaussures, lavent les dents ; les bébés deviennent de jeunes enfants et les mères continuent de « faire à la place » des enfants qui ne savent pas faire, c’est tellement logique, surtout quand on n’a pas le temps ! (ces phrases valent aussi pour les pères).

 

Le comble dans cette aventure : en tant que parent, nous nous retrouvons un jour devant cet enfant qui essaie vainement de mettre ses chaussures, de faire ses noeuds ou de se laver les dents, seul, qui met un temps fou ou n’y arrive pas, voire même qui abandonne très vite la partie et « appelle à l’aide » et nous lui lançons un magnifique « non, mais tu sais toujours pas mettre tes chaussures / faire tes noeuds / te laver les dents ?! ». 

Maria Montessori nous dit : « Tout ce qui est aide inutile constitue une entrave au développement des forces naturelles » (Pédagogie scientifique, tome 1, page 44). Qu’est-ce que ça signifie et quel est le lien avec « le tyran » ?

 

Nous l’avons vu dans l’épisode 3, dès la toute petite enfance, les parents ont tout à gagner à « enseigner » ces gestes de la vie quotidienne :

  • pour que les enfants construisent leurs « outils de la vie »,
  • mais aussi pour qu’ils n’évoluent pas vers un schéma où l’enfant pourrait en effet devenir un tyran, aux yeux des parents…

(« comment s’y prendre pour enseigner ces gestes », pourrait d’ailleurs être le sujet d’un prochain épisode… vous souvenez-vous comment vous avez appris à faire vos noeuds de lacets ? Qui vous a transmis cette expérience ? Comment il/elle s’y est pris ?)

Qu’est-ce qu’un tyran ? C’est un individu qui exerce son autorité absolue et s’est emparé de ce pouvoir de manière illégitime… (l’enfant pourrait être un tyran ?! ).

Dans l’interprétation de Maria Montessori, le tyran, finalement, n’est rien sans ses serviteurs, ses fidèles ou ses esclaves et ce tyran se croit indépendant parce que personne ne le commande et qu’il commande aux autres, alors qu’en réalité, il est complètement dépendant puisqu’il a besoin de ses serviteurs. Qu’en est-il alors de ce jeune enfant à qui on « fait à la place », croyant l’aider, ou pour gagner du temps ou parce qu’on fait comme on nous l’a montré ? Il pourrait avoir l’impression qu’il n’est pas capable, il est contré dans son projet d’essayer, il pourrait insister, râler, s’opposer, se résigner, perdre peu à peu son intérêt à découvrir et essayer. Finalement, la prochaine fois, il va faire au plus simple et « exiger » que le parent le fasse directement à sa place. Dans cette logique, l’aide apportée n’en est pas une, pire, elle rend l’enfant dépendant et, se mettant à « exiger » un comportement de l’adulte, il devient tyrannique aux yeux de ce parent.

En le servant, plutôt qu’en l’aidant à faire seul, nous l’empêchons de gagner son indépendance ; en devenant son « esclave », nous en faisons un tyran… Aïe ! C’est un peu fort ?!

Un proverbe chinois dit : « Quand un homme a faim, mieux vaut lui apprendre à pêcher que de lui donner un poisson » (Confucius). Cette pensée rejoint celle de Maria Montessori lorsqu’elle fait parler l’enfant qui, tout petit, dit à l’adulte : « aide-moi à faire seul ». Si nous faisons à la place de l’enfant au lieu de l’aider à savoir faire, nous déplaçons le problème et c’est là qu’il pourrait devenir « tyrannique » car :

  • il va perdre son intérêt naturel de découvrir, expérimenter, essayer,
  • Il pourrait éteindre la petite flamme qui le pousse à avancer seul,
  • et, ne pouvant plus faire par lui-même, se retrouver dépendant.

Alors, le plus difficile, dans cet « apprentissage à devenir un parent »  pourrait être, non pas d’avoir peur qu’il devienne tyrannique, mais de prendre le risque et le temps de le laisser faire, car le plus compliqué c’est :

  • de se retenir d’intervenir pour empêcher l’enfant se faire quelque chose « parce qu’il va… » (ex : « je lui tiens la cuillère parce qu’il va en mettre partout »),
  • de se retenir d’intervenir pour faire à sa place, croyant l’aider.

« Aider », ce serait plutôt lui enseigner un geste, lui faire une démonstration pour que l’enfant fasse pareil,… 

Mais en même temps, dès qu’on s’en rend compte, dès qu’on en fait l’un de ses objectifs (l’un de ses devoirs ?) de parents, alors accompagner son enfant à devenir autonome va le rendre véritablement indépendant ! Et le « double effet kiss cool » de cette posture va alléger la vie des parents !

Prochain épisode : comment lui « enseigner » la vie quotidienne en pratiquant le « il pourrait… » plutôt que le « il va… »

lien vers le fichier pdf de l'épisode : Episode 5 parents confinementEpisode 5 parents confinement (56.66 Ko)

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